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Rambalh, c'est un pot pourri de mes lectures, un blog pour partager mes coups de coeur et de gueule. Rambalh signifie Bordel en Occitan et c'est un peu le cas de ce blog. Il est surtout né de mon besoin de garder une trace de mes lectures. Retrouvez-moi aussi sur Accros & Mordus de Lecture.

mercredi 27 janvier 2021

Flic de Valentin Gendrot

Lorsque Flic de Valentin Gendrot est sorti, je me suis dit que le lire permettrait peut-être d’apporter un nouvel éclairage à la situation policière des plus tendues en France, se dégradant d’années en années. Entre les témoignages des deux bords que j’ai pu entendre (et pas juste lire dans la presse), les images, les faits… J’avais envie de voir ce qu’un journaliste en immersion pouvait apporter de plus à l’édifice effrayant de la fracture chaque jour plus large que connaît notre société… J’ai lu ce livre il y a plusieurs mois, lors de sa sortie.



Quatrième de Couverture
Jusqu'à présent aucun journaliste ne s'était lancé un tel défi : infiltrer la police. Valentin Gendrot, adepte des reportages en immersion, a osé. Il a suivi une formation express avant d'intégrer un commissariat durant six mois. Celui du 19e arrondissement de Paris, un secteur réputé sensible. Une arme à la ceinture, le journaliste sous couverture a rejoint une brigade dont certains membres tutoient, insultent et distribuent régulièrement des coups à des jeunes hommes noirs, d'origine arabe ou migrants qu'ils surnomment "les batards".

Ce livre dévoile les coulisses d'une profession souvent accusée de violences, de racisme et aux taux de suicide anormalement élevé. Un récit urgent, tant pour les victimes des violences policières que pour les policiers eux-mêmes.

Mon avis
Valentin Gendrot est un journaliste habitué aux missions d’infiltration. Il a choisi pour celle-ci d’intégrer directement la police en tant qu’adjoint de sécurité, un poste de contractuel lui permettant après une formation express de trois mois d’intégrer une équipe pour alimenter son enquête.

J’attendais de ce livre qu’il apporte des informations inédites sur les rouages de la police, sur les difficultés et problèmes de recrutement ainsi que sur l’usage à outrance de contractuels dans la fonction publique et ses dérives (puisque la police n’est pas le seul secteur touché par ce fonctionnement, l’exemple de l’éducation nationale étant aussi édifiant).

Flic est vendu comme une enquête inédite, un pavé lancé dans la mare mais le seul fait inédit qui en découle est l’acte d’infiltration (qui est tout de même une prouesse en soi). Les informations distillées dans les pages de ce livre ne sont ensuite pas novatrices : peut-être suis-je déjà trop bien informée sur le sujet ? Quoi qu’il en soit, j’ai eu l’impression de lire une compilation d’articles déjà vus (et c’est d’ailleurs réellement le cas de certains passages). Pour toute personne qui n’a aucune idée de la situation actuelle, de la dégradation des conditions de travail dans la fonction publique, cette enquête peut-être un bon point de départ pour commencer à comprendre le pourquoi du comment. Pour le lecteur déjà sensibilisé sur le sujet et qui veut en apprendre plus, ce n’est pas le livre idéal.

Du point de vue du non initié, Flic est une plongée vers l’absurde du monde des forces de l’ordre. Les postes de fonctionnaire de suffisent pas à remplir les rangs de la police et l’état recrute au rabais de petites mains pour épauler ses troupes. Ces postes de contractuels font de l’état une immense boîte d’intérim via une sorte de concours express, de formation au rabais, condensée au maximum et donnant l’impression de lancer sur le terrain des personnes ayant obtenu leur laisser-passer dans un kinder surprise. Dans le lot, il y a ceux qui hésitent à réellement se lancer dans le concours de Gardien de la Paix mais aussi ceux qui n’ont pas le niveau pour le concours externe ou, pire, pour le concours interne une fois déjà ADS. Et là, c’est dramatique pour notre système. Les profils des candidats sont effrayants, le contenu de la formation est aussi fin que du papier et le résultat… À la hauteur de la politique intérieure foireuse des gouvernements successifs de ces dernières années.

Une fois en poste, Valentin Gendrot entre sur la piste de ce cirque que nous appelions autrefois police. Son premier poste n’est pas le plus intéressant pour son enquête, consistant simplement à surveiller des personnes hospitalisées compte tenu de leur état psychologique fragile lors de leur arrestation. C’est en se faisant muter dans un commissariat que les choses sérieuses commencent et que le journaliste découvre l’absurdité de la police de nos jours : choisir de se faire bouffer par les collègues s’il n’entre pas dans l’ambiance de son équipe et/ou se faire bouffer par le contact à la population sur laquelle les policiers apprennent à évacuer leur frustration à défaut d’avoir un rythme de vie permettant de le faire dans leurs loisirs. Et cette population est évidemment ciblée, elle permet de ne pas trop culpabiliser : après tout, en quoi secouer un « voyou » est-il un problème et qui ira s’en plaindre ?

Ce qui est frustrant en lisant cette enquête, c’est de suivre le journaliste comme spectateur et de le voir prendre des notes sur des faits que l’on connaît déjà. Certains diront que ça apporte du concret à ce qu’on entend partout. Mais est-ce que ce n’est pas alors avouer apporter peu de crédit au travail de ses collègues journalistes ? Est-ce que ce n’est pas dire « ouais mais lui il l’a vu de l’intérieur pour de vrai » ? Les témoignages et enquêtes sont déjà nombreux, a-t-on réellement besoin de quelqu’un qui dit « j’ai vu tout ça c’est vrai » pour enfin y croire ? Je n’avais pas besoin de lire Flic pour ça. Mais tant mieux si des lecteurs sceptiques peuvent avec ce livre accepter la réalité. Je regrette simplement que ce livre ait été vendu comme une pépite pour tous, alors qu’elle l’est à mes yeux uniquement pour ceux qui ne sont pas encore conscients de la réalité.

Cette réalité où la police déborde dans tous les sens du terme : dans ses actes mais aussi par la pression qu’elle subit. On est au-delà du bon ou du mauvais flic, on est sur le point de rupture du trio qui ne fonctionne plus : l’état, la population et la police. C’est bien au-delà de notre société qui se casse la gueule, c’est le reflet de notre monde dans sa totalité qui se penche au-dessus du vide. À défaut d’apporter un nouvel angle ou même ne serait-ce qu’une enquête avec un œil critique, Valentin Gendrot offre un énième témoignage de la chute de la police française, gentiment poussée par une pichenette grossière de l’état, coupable d’avoir grandement participé à sa détérioration.

Je regrette le manque d’analyse de cette enquête qui m’a donné l’impression d’un simple listing des problèmes croisés par le journaliste mais je salue l’effort et le partage de la réalité que tout le monde ne veut pas encore voir.

À lire uniquement si vous ne savez rien de la police aujourd’hui.

Les avis des Accros & Mordus de Lecture

2 commentaires:

  1. Ce livre m'intéresse pour son côté témoignage, même si je note qu'il manque d'analyse !

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