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Rambalh, c'est un pot pourri de mes lectures, un blog pour partager mes coups de coeur et de gueule. Rambalh signifie Bordel en Occitan et c'est un peu le cas de ce blog. Il est surtout né de mon besoin de garder une trace de mes lectures. Retrouvez-moi aussi sur Accros & Mordus de Lecture.

samedi 16 avril 2016

La 5e Vague, Tome 1 de Rick Yancey

Nouvelle saga au compteur, on peut mieux faire mais ce n'est pas si mal. Par contre, je ne pense pas aller voir l'adaptation...



Quatrième de Couverture
1ère Vague : Extinction des feux
2e Vague : Déferlante
3e Vague : Pandémie
4e Vague : Silence

À l’aube de la 5e Vague, sur une bretelle d’autoroute désertée, Cassie tente de Leur échapper…Eux, ces êtres qui ressemblent trait pour trait aux humains et qui écument la campagne, exécutant quiconque a le malheur de croiser Leur chemin. Eux, qui ont balayé les dernières poches de résistance et dispersé les quelques rescapés…
Pour Cassie, rester en vie signifie rester seule. Elle se raccroche à cette règle jusqu’à ce qu’elle rencontre Evan Walker. Mystérieux et envoûtant, ce garçon pourrait bien être son seul espoir de sauver son petit frère, voire elle-même. Du moins, si Evan est bien celui qu’il prétend…

Ils connaissent notre manière de penser.
Ils savent comment nous exterminer.
Ils nous ont enlevé toute raison de vivre.
Ils viennent maintenant nous arracher
ce pour quoi nous sommes prêts à mourir…


Mon avis
Les Extra-Terrestres débarquent. Tout est mis en place pour établir le contact avec eux mais seul le silence répond à l’humanité… Puis c’est le blackout. Et les catastrophe s’enchaînent, anéantissant plus de quatre-vingt-dix-sept pour cent de l’humanité. Ce n’est pas fini. Les morts s’enchaînent encore, conduisant l’humanité à une fin qui semble certaine… Et, au milieu de toute cette horreur, ce sont les enfants et les adolescents qui tiennent le rôle principal.

La 5e Vague est un phénomène mondial, un livre qui a si bien fonctionné qu’il a été adapté sur les écrans. Que d’éloges sur cette saga… Heureusement, mon ancienne colocataire avait lu le premier tome et m’avait plutôt bien décrit la chose : une histoire sympa, mais rien de nouveau sous le soleil, de quoi passer le temps mais sans émerveillement. Du coup, je n’attendais pas grand-chose de ce livre, tout en ayant envie de le lire, et heureusement : j’ai ainsi pu le prendre tel qu’il est.

La trame n’a rien de novateur mais elle est très bien gérée : une invasion à distance, sans avoir besoin de sortir l’artillerie lourde, juste en abolissant les privilèges techniques, en secouant un peu la Terre et en laissant une terrible pandémie finir le travail. On déblaie le terrain sans trop se salir et ça, c’est bien. Replacer l’être humain plus bas dans l’échelle permet de s’interroger sur l’humanité, ses forces et ses faiblesses. Ensuite, commence la partie la plus terrible pour l’espèce (si si, c’est possible) : savoir à qui se fier et ne pas sombrer dans une folie paranoïaque mortelle. Là est tout l’intérêt du livre selon moi : voir comment les personnages réfléchissent quand ils ne peuvent plus se fier à rien… Et voir comment ils capitulent quand on leur donne un nouveau repère, qu’il soit réel ou complètement distordu.
Là où la trame principale apporte quelque chose de nouveau dans le genre, c’est dans le choix des personnages : enfants et adolescents sont les héros de ce roman. Pourquoi ? Premièrement parce que ce livre s’adresse à un public jeune et deuxièmement parce que, finalement, quoi de plus logique que de ne garder que les humains qui n’ont pas encore atteint l’aboutissement réflexif de l’âge adulte ? Il est plus facile de bousculer les convictions des jeunes que des moins jeunes. Seulement, je me suis rendu compte que j’aurais aimé avoir au moins un point de vue adulte dans ce livre, avoir une opposition entre ces jeunes encore malléables et les plus vieux, plus campés sur leurs positions.

Concernant les personnages, Rock Yancey nous permet d’en suivre plusieurs. Au départ, je pensais ne suivre que Cassie, notre héroïne, la première partie lui étant consacrée et très dense, et j’ai été surprise de passer ensuite à d’autres personnages… J’ai eu du mal au début, puis je m’y suis faite et heureusement !
Nous rencontrons Cassie lorsqu’elle est seule et tente de survivre. Elle s’accroche à un but pour continuer : retrouver son petit frère, emmené par l’armée. Ses réflexions, son évolution, ses craintes m’ont permis de me plonger totalement dans l’ambiance de chaos et de survie. Cassie est très intéressante, elle se construit superbement au fil des pages puis… Tout retombe comme un soufflet quand elle rencontre Evan. Parce qu’elle redevient une adolescente « normale ». Evidemment, cela permet de rappeler qu’elle est humaine et surtout qu’elle est encore jeune, mais toute cette partie avec Evan m’a coupée dans mon élan. J’ai levé les yeux au ciel je ne sais combien de fois et j’ai regretté la partie où elle est seule. Si je comprends qu’elle ne pouvait rester seule et atteindre son but, je reste déçue du résultat.
Comme je le disais, heureusement, on suit d’autres personnages à travers les aventures de Sammy, le petit frère de Cassie, emmené dans un camp d’entraînement où des enfants et des adolescents sont conditionnés pour tuer les Autres. A cinq ans à peine, on vous apprend à tuer. A sept/huit ans, on vous envoie en mission suicide. C’est complètement surréaliste mais, finalement, ça colle avec la logique de l’histoire. Bon, le fait de coller n’a pas suffi à me plaire : voir des gosses de dix ans se transformer en machines de guerre n’a pas complètement atteint son objectif avec moi. Mais ça se défend plutôt bien.

Entre personnages et trame de fond, La 5e Vague est plutôt pas mal. Ce n’est pas le livre du siècle mais la recette permet d’obtenir un plat qui fonctionne plutôt bien en bouche. Maintenant, il faut aimer le genre : personnellement, je pense qu’un livre avec des héros plus âgés me correspondrait plus mais j’ai su apprécié ce que celui-ci avait à m’offrir. Et puis, au fil des pages, l’histoire se complique pour s’éclaircir ensuite, et les choix scénaristiques de l’auteur s’avèrent cohérents et même intéressants.

Le gros bémol au-delà de la nécessaire histoire amoureuse d’adolescents (oui, là où Cassie devient chiante) ? L’écriture. Je ne dirais pas que c’est mal écrit… Juste mal coordonné. On est dans un style narrateur interne et c’est là que le bât blesse. Si au départ, notamment avec Cassie, tout file bien, la fin devient étrange. Cassie est une adolescente drôle, mais à travers son cynisme (cynisme que l’on comprend vue la situation). En tant que narrateur, elle utilise un langage adolescent, peu classieux, mais qui colle. Puis, finalement, je me suis rendu compte que l’auteur avait perdu l’authenticité de ce langage en l’adoucissant. Et il a fait l’erreur de caler des « m’occuper de son cul me prend un max de temps » à côté d’expressions d’un langage plus courant dans les descriptions. Cela m’a donné l’impression d’un énorme faux raccord. Le style fluide du départ s’est mis à sonner faux et a suffi à m’agacer dans les deux cents dernières pages. Peut-être que cela vient de la traduction mais, dans tous les cas, il y a un vrai problème avec l’écriture. Je ne suis pas tatillonne sur le sujet en général, mais là, ça a vraiment cassé le rythme de ma lecture et je le regrette. Surtout quand je vois des chroniques vantant le style d’écriture de l’auteur : quand on fait ce genre d’erreur, on a quand même besoin de se recentrer un peu.

Bref, ce livre est sympathique, bien pensé, plutôt bien ficelé sans pour autant être une pépite de réflexion scénaristique. J’ai pu apprécier ma lecture parce que je n’attendais rien d’exceptionnel. Si je n’avais eu que des retours enchantés, je crois que je serais tombée de bien haut. La 5e Vague n’a rien de révolutionnaire mais il permet d’étendre la science-fiction à un nouveau public, un public qui vit au rythme du Young Adult adaptable au cinéma. On aime ou on déteste cette mode, elle atteint tout de même ses objectifs : il y avait longtemps que je n’avais pas lu de science-fiction et ce livre m’a donné envie de retourner un peu vers ce genre. En tapant dans des romans bien meilleurs, évidemment.
Je lirai la suite parce que malgré ses défauts, le livre donne envie de poursuivre. Il donne envie de savoir comment les personnages vont réussir à affronter la fin de l’espèce. Ce n’est pas le nirvana mais plutôt une balade agréable : on s’en souviendra comme d’une promenade sympa mais on gardera en mémoire le mal de pieds qui va avec, et le temps un peu pourri. Un bon moment mais qui ne suffit pas à oublier les défauts qui vont avec.

Je le conseille à ceux qui aiment la Science-Fiction grand public et le Young Adult.

samedi 9 avril 2016

Tour de plume de Caroline Deyns

On continue avec les livres achetés d'occasion avec un premier roman qui a attisé ma curiosité, tant par sa couverture que son résumé. Malheureusement, cela n'a pas fonctionné comme je l'aurais voulu.



Quatrième de Couverture
Un jour, une jeune fille, Isis, entre dans la boutique pour demander son chemin, griffonne un plan, et, cédant à la tentation, dérobe le stylo du libraire. L'objet passera alors de main en main, pour nous entraîner dans une étonnante ronde de personnages : Isis elle-même, fragile adolescente aux journaux intimes peu communs ; Paul, jeune homme faussement ordinaire, s’égarant de soirées arrosées en nuits décousues ; Sybille, « bibliovore » obèse, qui s’est volontairement ensevelie sous la graisse au fil des ans ; Emma, trentenaire rangée dont la soudaine déraison ravive une ancienne fêlure ; Roman Hipser, écrivain reconnu…
Ainsi se déroule avec brio un récit dévoilant les failles de chacun, jusqu’à un surprenant final. C’est seulement alors que se révèle le sens du roman, de ce Tour de plume à la saveur douce-amère qui sait si bien tisser des liens entre l’amour des livres et les blessures des hommes.

Mon avis
Récit articulé autour de différents personnages à travers un objet qui leur est commun, Tour de plume aborde différents aspects de l’art et principalement de la littérature. De l’écrivain raté à l’adolescente étrange, en passant par le trentenaire perdu puis la quinquagénaire envahie par ses livres, de la muse répudiée à l’auteur reconnu, nous affrontons avec les personnages leurs prises de conscience et les raisons qui les ont amenés à être ce qu’ils sont.

Appréciant les petites tranches de vie, je pensais trouver dans ce livre différentes histoires touchantes, pleines de réalismes. A la place, j’ai eu sous les yeux la personnification des angoisses de l’artiste, agrémentées d’une plume qui n’était pas toujours en accord avec ce que j’avais l’impression de comprendre.
Le livre est bien écrit, peut-être « trop ». Trop de fioritures pas moment alors qu’une phrase simple aurait été plus percutante. La profane que je suis ne trouve pas que les phrases alambiquées conviennent à tous les romans et ce fut le cas ici. Une fois le livre refermé, on comprend mieux le choix, certes, mais cela ne m’a pas suffi à l’accepter. J’aurais aimé de la légèreté à certains moments même si, finalement, la lourdeur du texte a réussi à faire peser l’histoire. Dans le bon sens ? Je ne sais pas. Je n’ai pas réellement accroché à l’histoire. L’écriture y a été pour beaucoup. Mais pas seulement. Les personnages ont suscité ma pitié mais en aucun cas mon attachement. Névroses, psychologie de comptoir et métaphores filées autour de la littérature n’ont fait que m’éloigner des protagonistes. Mais, n’est-ce pas là aussi l’effet voulu ? On contemple finalement un spectacle de marionnettes, on regarde de loin ces personnages enfermés dans les cages qu’ils se sont eux-mêmes construits.
Si je n’ai pas été transportée par la lecture, c’est uniquement parce que le style ne fonctionne pas sur moi. Au fond, il y a de la qualité dans ce livre, je le reconnais, je n’ai juste pas été touchée. Je voulais en finir au plus vite, parce que je me sentais écrasée par ces histoires, ensevelie sous des phrases à la lourdeur étouffante, aux significations bien trop poussées pour que je les apprécie. Les comprendre, oui, les déguster, non. Et pourtant, même si je ne suis pas dotée d’une grande sensibilité littéraire quand on parle d’exercice de langue, je suis capable de ressentir la beauté d’un texte. Ici, j’ai perçu cette beauté sans qu’elle ne m’atteigne et c’est dommage.

La fin n’a pas fait mouche pour moi et, pourtant, elle est pleine de sens. Logique. Peut-être espérais-je quelque chose de plus original, ou de carrément banal. Deux extrêmes mais pas le juste milieu. Tant pis, le but recherché est moitié atteint avec moi : je suis venue, j’ai lu, j’ai compris, je suis repartie. Sans regard en arrière.

Pour un premier roman, Tour de plume a ses qualités et ses défauts. S’il ne m’a pas fait une grande impression parce que j’attendais autre chose, il plaira sûrement à ceux qui aiment les histoires de livres et les artistes torturés. Je le conseille uniquement à ce lectorat.

jeudi 7 avril 2016

Une étoile aux cheveux noirs d'Ahmed Kalouaz

L'avantage d'acheter des livres d'occasion, c'est qu'on se permet d'acheter des tas de livres sans se demander "et si ça ne marchait pas ?" et c'est tant mieux ! Ainsi, j'ai pu découvrir des tas d'auteurs comme Ahmed Kalouaz !



Quatrième de Couverture
Aux portes de l'automne, un homme entreprend de traverser la France à mobylette, d'un port de Bretagne jusqu'à Grenoble, pour aller retrouver sa mère. Née dans un village d'Algérie, descendue d'un bateau à Marseille dans les années 1950, elle va subir à quatre-vingt-quatre ans un dernier déracinement : l'immeuble dans lequel elle vit depuis quarante ans doit être rasé.
Au fils des mille kilomètres de trajet, le fils remonte le cours de l'histoire de sa mère : l'enfance confisquée, les premiers taudis lors de l'arrivée en France, le racisme mais aussi les parfums épicés de sa cuisine, sa force d'espérance, l'amour porté à ses quatorze enfants.
A cette mère illettrée, dépossédées très tôt de son destin, Ahmed Kalouaz adresse une lettre bouleversante de tendresse et de pudeur. Après l'évocation de son père dans "Dans tes mains", il poursuit l'exploration de sa mémoire familiale, illuminée par sa plume dense et limpide.

Mon avis
L’histoire s’articule uniquement autour du périple entrepris par ce fils, de Bretagne à Greboble, en mobylette. Il prend son temps pour rejoindre sa vieille mère, plusieurs jours, sur son engin qui ne respire pas la jeunesse et qui appartenait à son père. Au détour de ses haltes dans les villages qui attirent son attention, ce fils retrace le fil de la vie de sa mère, ce qu’il en sait. Il se rend compte qu’il y a beaucoup de choses qu’il n’a pas pris le temps de lui demander. Et il le regrette.

Ahmed Kalouaz nous entraîne dans quelques passages de vie d’une immigrée, mariée jeune, sans amour, ayant perdu des enfants, ses racines, sa jeunesse. D’un petit village d’Isère à une cité grenobloise, l’auteur nous parle de la misère, des difficultés rencontrées par les Algériens arrivés en France pour travailler. Racisme, dur labeur, paye médiocre, retraite honteuse… Mais, surtout, condition de la mère. Cette mère qui a quitté son pays en pensant y revenir rapidement mais qui est toujours en France à quatre-vingt-quatre ans, cette mère qui a élevé dans la misère tous ses enfants en leur assurant le meilleur avec ses maigres moyens, cette mère qui les a préservés de l’attrait du crime à coup de menaces, cette mère qui n’a jamais su lire mais qui leur a tout donné pour qu’ils puissent devenir de bonnes personnes, cette mère qui au fil des ans s’est rapprochée de la religion en voilant ses cheveux, en faisant le pèlerinage... Et ce fils qui se rend compte qu’il n’a peut-être pas suffisamment dit « merci », par pudeur, parce qu’on ne dévoilait pas ses sentiments, on n’abordait pas certains sujets… Comme le fait que cette mère illettrée n’ait finalement pas accès à ce qu’écrit son fils : personne parmi ses enfants n’a eu l’idée de lui apprendre à lire, à écrire. Elle n’en a pas formulé le désir parce que beaucoup de choses ne se disaient pas.

« Tu es là, que Dieu te garde, tu es souvent parti loin de moi. J’ai fait beaucoup d’enfants, il m’en est toujours resté deux ou trois, à portée de main, fidèles. Je parle, je parle, tu veux un thé peut-être ? Oui, tu veux un thé. On me dit que tu écris, mais pour qui ? Si ta mère n’y a pas droit, ça sert à rien non ? Et puis moi aussi j’ai de quoi raconter ! Si tu savais tout ce que j’ai fait pour vous, pour toi. Dans le noir, pour ne pas vous déranger, je cherchais la boîte d’allumettes. Je savais, en grattant la première, donner un peu de lumière dans la pièce. » (p106)

Ahmed Kalouaz réussit à transmettre toute sa mélancolie, tous ses regrets, toute la beauté de cette histoire. Ses descriptions sont superbes, poétiques et sans trop de fioritures. Le voyage et les souvenirs se mélangent tout au long du livre, avec des transitions parfois floues, sans que cela dérange, bien au contraire, on entre plus encore dans la tête du personnage. Prenez vos pensées, lorsque vous marchez par exemple : « le café de ce matin m’a fait du bien, vraiment, je me souviens de l’odeur du café dans la cuisine, quand j’étais petite, que papa buvait à grands bols, oh, j’adore les cheveux de la personne qui marche devant moi… ». Ce roman est écrit de façon aussi naturelle dans l’enchaînement, si ce n’est qu’il est bien plus poétique que nos pensées du matin. Il faut que ce genre de structure plaise, c’est évident, et c’est le cas pour moi. Cela m’a permis de prendre ce livre comme un vrai récit, comme si les mots que je lisais, je les prenais directement dans la tête de l’auteur. Le format court permet cet exercice et Ahmed Kalouaz le sublime.

Le narrateur soulève des questions liées à l’immigration, de la religion à l’attachement à l’Algérie pour sa mère, de son attachement à la France pour lui. Il appose sans violente opposition, parce que leurs vécus sont différents, leurs souvenirs aussi. Lui s’est construit en France, après être né en Algérie. Elle, a fait sa vie en France, avec en tête de rentrer un jour chez elle. Il ne peut y avoir de comparaison stricte et il n’en fait pas. Il compare et comprend qu’il n’a pas posé toutes les questions qu’il aurait dû à cette mère dont il ne connaît pas tout : elle a partagé avec lui très peu de souvenirs de l’Algérie de sa jeunesse, finalement, et il le regrette aujourd’hui.

Ahmed Kalouaz signe ici un récit tendre, triste et touchant. Décousu mais qui dit l’essentiel et dont la forme se prête complètement à des souvenirs saupoudrés çà et là. Deuxième tome d’un triptyque sur sa vie, l’auteur se livre dans un hommage poignant à sa mère, figure forte que la vie n’a pas épargnée. Les tomes peuvent se lire séparément, mettant chacun en avant une personne de sa famille. Si vous aimez les récits du genre, n’hésitez pas. Si par contre vous avez besoin d’une structure plus stricte, moins floue, vous risquez d’être légèrement déroutés par l’enchaînement des idées. Pour la poésie, les regrets, la vie, foncez.

mercredi 6 avril 2016

Le charme discret de l'intestin de Giulia Enders

Aussitôt acheté, aussitôt lu ! Ce livre est un bon gros coup de ♥ ! De la science vulgarisée avec justesse, de l'humour, de jolies illustrations : une magnifique histoire d'amour entre l'auteur et l'intestin.



Quatrième de Couverture
Surpoids, dépression, diabète, maladies de peau… et si tout se jouait dans l’intestin ?
Au fil des pages de son brillant ouvrage, Giulia Enders, jeune doctorante en médecine, plaide avec humour pour cet organe qu’on a tendance à négliger, voire à maltraiter. Après une visite guidée au sein de notre système digestif, elle présente, toujours de façon claire et captivante, les résultats des toutes dernières recherches sur le rôle du “deuxième cerveau’’ pour notre bien-être. C’est avec des arguments scientifiques qu’elle nous invite à changer de comportement alimentaire, à éviter certains médicaments ainsi qu’à appliquer quelques règles très concrètes en faveur d’une digestion réussie.
Irrésistiblement illustré par Jill Enders, la soeur de l’auteur, voici un livre qui nous réconcilie avec notre ventre.
Succès surprise, Le Charme discret de l’intestin s’est vendu à plus de un million d’exemplaires en Allemagne et sera publié dans une trentaine de pays.

Née en 1990, Giulia Enders, passionnée de gastroentérologie, finalise sa thèse à l'université de Francfort. Motivée par la guérison de sa grave maladie de peau grâce à un changement radical de son alimentation, la jeune femme se penche sur les études les plus récentes de ce domaine. Premier prix de la Nuit des sciences de Berlin, où les jeunes chercheurs communiquent de la façon la plus originale le résultat de leurs études, son intervention a eu un succès faramineux sur la Toile.
L’illustratrice Jill Enders, graphiste diplômée, participe dès le début au succès des travaux de sa soeur.


Mon avis
J’ai entendu parler de ce livre il y a plusieurs mois déjà et, dès le départ, il m’a appelée. Je suis ce qu’on pourrait appeler une « décomplexée du caca », je n’ai aucun problème à dire « Je vais faire caca ». Si on a le malheur de m’entendre à travers la porte, et bien tant pis. Et si on le dit « Mais ça ne nous intéresse pas, j’aime pas », c’est bien dommage : être décomplexée du caca, c’est le meilleur moyen de pouvoir aller au toilette quand on en a besoin sans que la tête bloque le processus parce qu’on sait qu’il y a un autre individu dans le coin. Et ça, croyez-moi, c’est magique : se foutre totalement de la finesse de la porte qui vous sépare de la foule permet de se sentir mieux. Surtout en cas de stage de terrain de plusieurs jours, en cohabitation avec ses camarades géologues. Pourquoi tout ce laïus ? Parce que, forcément, quand j’ai vu la façon dont Giulia Enders parlait de l’intestin, en insistant sur le fait qu’on ne devait pas avoir honte de notre système digestif, je me suis dit illico que c’était pour moi (et ce sera peut-être pour vous).


Le charme discret de l’intestin est souvent positionné dans les rayonnages consacrés à la diététique et aux régimes A TORT. Ici, Giulia Enders ne nous dit pas « donne ça à ton corps et tu auras ça », pas du tout : elle nous présente plutôt l’intégralité du système digestif, de la bouche à l’anus, en montrant par A + B que l’intestin est le centre, le cerveau même de notre digestion, et de bien plus encore. Le fonctionnement de nos organes est détaillé de manière très abordable et Giulia Enders effectue un véritable travail d’orfèvre en rendant donnant enfin ses lettres de noblesse à notre intestin : elle sublime cet organe qu’elle aime, qu’elle chérit et qu’elle veut faire briller.
Appuyé sur des publications récentes (dont les sources sont citées en fin d’ouvrage), son travail aborde beaucoup de phénomènes de « mode » comme les intolérances au gluten et au lactose : Giulia Enders explique ce qu’il se passe réellement dans notre intestin et donne des pistes pour s’adapter. Mais uniquement des pistes. Parce que là est toute la différence avec les ouvrages sur la digestion, et plus généralement l’alimentation, qu’on trouve actuellement : la doctorante ne nous dit pas quoi faire, elle nous explique les causes, nous propose différentes solutions mais nous met constamment en garde contre les idées reçues, les régimes radicaux (surtout sans raison valable) et les fausses solutions.
Le but de Giulia Enders n’est pas de nous proposer un autre mode de vie, non, elle cherche juste à nous présenter ce système digestif qui fonctionne à plein régime dans notre corps et les bactéries avec lesquelles nous cohabitons depuis notre naissance. Elle nous aide à apprendre à nous connaître et à nous réconcilier avec cet organe « disgracieux » qu’est l’intestin, organe qui pourtant est plus propre que nos mains ou le sol que nous foulons chaque jour car en totale adéquation avec nous-même.

Le charme discret de l’intestin se lit comme un roman, agrémenté de quelques illustrations mignonnes et efficaces. Le contenu est abordable par chacun et tout est si bien expliqué que rien n’est incompréhensible. L’écriture de l’auteur est parfaitement adaptée à l’esprit de ce livre : phrases précises et imagées à la fois, humour détonnant, descriptions amoureuses de l’intestin et de ce qui l’entoure, exemples qui parlent à tous les lecteurs… Vraiment, lire ce livre est un pur régal et cela va vite, à part peut-être la dernière partie qui aborde les bactéries et qui, sans être lourde pour un sou, est moins légère que les deux premières parties.

L’humour est vraiment la clé de ce livre, un moyen de faire plaisir à ceux qui, comme moi, n’ont pas de problèmes avec leur système digestif et de détendre doucement les lecteurs qui ont plus de mal à aborder cet aspect de leur corps. Juste pour le plaisir :

Conclusion n° 1 : c'est vrai, en position accroupie, le canal intestinal est droit comme une autoroute et tout ce qui y circule va droit au but. Conclusion n° 2 : il y a des gens sympas qui avalent des substances fluorescentes et se font radiographier pendant qu'ils font caca, tout ça our servir la science. Deux résultats qui, à mon avis, ne devraient laisser personne indifférent. (p30)

Et gros gros plus pour « Le carnet scatologique » qui détaille tous les cacas, de la couleur à la consistance. Forcément, c’était pour moi !

Il est aussi agréable de voir de la remise en cause dans un texte de vulgarisation : plusieurs fois, Giulia Enders insiste sur le fait que certaines études ont encore besoin d’être validées, que la recherche a encore beaucoup à faire. Même en s’adressant à un public qui n’a pas le bagage pour savoir démêler le vrai du faux, la doctorante reste franche et ne joue pas le jeu de certains scientifiques qui tiennent pour acquis des résultats qui ne le sont pas toujours. Je ne peux que louer son attitude.
Des hypothèses très intéressantes reliant notre intestin à notre état psychologique sont amenées dans ce livre et elles offrent des pistes de recherche sur le sujet, notamment à travers les bactéries. Il est possible que certaines bactéries présentes dans notre système digestif soient capables d’influencer notre mental : si elles raffolent d’un mets, elles pourraient nous pousser à le consommer sans que nous nous en rendions compte, persuadés que c’est son goût qui nous fait y revenir. De même, des études menées sur les taxoplasmes montrent que ces parasites pourraient nous pousser à avoir des comportements extrêmes, comme des rats qui, défiant leur instinct de survie, resteraient à proximité de l’urine de chat car les taxoplasmes de leur organisme feraient en sortent de pénétrer dans le système disgestif d’un chat, palace suprême pour eux, en passant par la voie royale.
Bref, ce livre regorge d’informations plus intéressantes les unes que les autres et nous montre à quel point sous-estimer notre « deuxième cerveau » est bien dommage.

J’ai pris énormément de plaisir à lire cet ouvrage, à en découvrir plus sur mon intestin et ses à-côtés, à comprendre que notre système digestif a une influence directe sur notre esprit. Giulia Enders a réussi à me transmettre son amour de l’intestin et je vais, à mon tour, tout faire pour passer le relai. Libérer la parole sur l’intestin et ce qui en découle n’est pas facile mais c’est passionnant et ça peut avoir des effets tellement libérateurs que je ne peux que vous conseiller, au minimum, de ne pas chercher à renier cette partie de notre corps avec laquelle vivre en harmonie est essentiel pour se sentir mieux. Et, je vous l’assure, être décomplexé du caca est une expérience qui fait du bien !

dimanche 3 avril 2016

La Quantité, la Qualité, la Honte, la Masse et l’Hypocrisie : quand on nous prend pour des pigeons sans cervelle.

Me voilà relancée dans le partage de mon ressenti du moment. C'est un texte un peu décousu, qui part dans tous les sens sans réellement approfondir un point en particulier mais j'avais envie d'aborder le sujet.

Aujourd’hui, je vais vous parler d’un sujet qui me taraude : éditer de la daube parce que ça se vend et, surtout, participer à cet engrenage malsain en tant que critique amateur.

C’est en écrivant une chronique sur une saga mal écrite et sans profondeur que j’ai eu envie de faire cet article, après avoir discuté du sujet au cours de ma lecture avec mes potos lecteurs. Maintenant, certains éditeurs (principalement américains j’ai l’impression), se contentent de publier des ouvrages médiocres parce qu’ils savent qu’ils les vendront. Pourquoi travailler sur la qualité quand on est déjà assuré de la quantité ? Prendre le lecteur pour une bonne poire avec un porte-monnaie, c’est « moderne ». Si on semble épargné en France avec nos maisons d’édition plus modestes, celles qui traduisent en masse les ouvrages bien vendus à l’étranger entrent tout de même dans cet engrenage malsain. Mais pourquoi est-ce que ça fonctionne ?



Quand on écrit un texte de bit-lit/urban fantasy/young adult fantastique, si on est mauvais, ce n’est pas bien grave parce qu’à coup de grandes campagnes de pub, la maison d’édition saura soutirer de l’argent aux pauvres lecteurs qui aiment ça et ont, malheureusement, appris à se contenter du médiocre. Pourquoi se fouler à donner une histoire bien écrite quand quelque chose de moyen à mauvais se vend quand même ?
L’exemple le plus actuel vient avec toutes ces fan-fictions qui deviennent des best-sellers : les lecteurs font fi de la forme pour se concentrer sur le fond. Mais réveillez-vous ! Vous méritez mieux ! On vous considère comme un sous-lectorat alors que, par le slip de Merlin, vous avez tout aussi droit à un beau texte qu’un amateur d’essais philosophiques. Encore une fois, on fait de l’argent sur le dos de personnes qui ne savent pas qu’elles peuvent demander mieux… Et ça m’écœure. Je ne critique pas ceux qui aiment ces livres, loin de là, je crache par contre mon dégoût au visage de ceux qui ne font pas l’effort d’offrir de la qualité à un lectorat fidèle et qui paye.
Et ça ne concerne pas uniquement ces genres. C’est un peu le même combat en littérature jeunesse : sous prétexte que l’on s’adresse à des enfants ou des adolescents, on fait parfois moins d’efforts. Pourtant, les lectures font elles aussi partie des petites briques que l’on utilise pour se construire. Certains genres semblent même s’être fait une raison et c’est triste : la Littérature du Terroir, par exemple, avec ses histoires à base de terres arides à faire revivre et de pauvre veuve fatiguée qu’un bel ingénieur agronome va aider… Certains auteurs ne se foulent plus, débitant trois/quatre livres à l’année avec un lectorat ciblé et fidèle, parce que ça fonctionne comme ça et que changer n’est pas utile.



On mérite mieux que ça ! Seulement, on a aussi le droit de s’en contenter mais, là aussi, le bât blesse. Rares sont les personnes qui assument lire des ouvrages qui sont franchement peu recherchés et mal écrits parce qu’on entre alors dans le débat sans fin de la qualité de la lecture. Il y a, en France en tout cas, une idée assez vilaine qui dit que lire de la littérature dite « bas de gamme » c’est Le Mal. Mais à quel moment a-t-on commencé à laisser ce clivage bonne lecture (celle qui fait réfléchir et est écrite avec des mots compliqués) - mauvaise lecture (comprendre qu’elle n’est pas faite de tous les effets de style nécessaires à la masturbation intellectuelle) prendre de l’importance ? Sûrement depuis des décennies.
Hiérarchiser les lectures est encore et toujours un moyen de se situer au-dessus des autres. Si ce n’est pas ce sujet que je souhaite aborder, il touche tout de même mon problème du doigt : puisqu’il y a une sorte de jugement dans le regard des autres quand on expose ses lectures, on cherche à se justifier. Et c’est bien dommage de 1) parce que chacun lit ce qu’il veut quand il veut quoi qu’en pensent les autres, de 2) parce qu’on en vient à mentir sur la qualité de l’ouvrage que l’on lit.


Rienafoutr' de ce que les autres pensent !

Je voudrais militer pour le droit à lire de la merde, mais ce, en toute honnêteté. Combien de fois me suis-je retrouvée avec un livre entre les mains parce que je n’en avais entendu que des éloges alors, qu’en fait, c’était terriblement mauvais ? Pourquoi ne pas assumer avoir aimé un livre moyen à mauvais pour ne pas berner les personnes suivantes ? On a le droit d’aimer un livre bancal. On a le droit de dire « c’est mal écrit, c’est cliché, niais, mais j’aime ».
Par pitié, copains de la sphère des critiques amateurs du web, arrêtez de berner le monde à coup de « c’est un super livre » parce que vous n’assumez pas de lire de la daube. Soyez honnêtes. Permettez aux suivants de savoir à quoi s’attendre. Ce n’est pas un crime d’aimer quelque chose de mauvais. Ce n’est pas honteux de payer 20 euros pour un livre écrit avec les pieds (c’est de vous le vendre qui est honteux). Par contre, participer à cette mascarade en faisant croire que chaque livre pourri est le livre du siècle, c’est arnaquer la moitié du lectorat, cette moitié qui refuse de se contenter du médiocre ou qui n’a pas envie de mettre ces 20 euros dedans. Parce que la prochaine fois que je lis un livre en m’attendant à quelque chose de chouette parce que j’ai lu une super chronique dessus alors, qu’en fait, la chronique n’était pas honnête, je trucide le responsable sur la place publique (bon, ok, peut-être pas, mais attention tout de même).



Et petit point mineur dans cet article mais non dans la vie : j’ai vu des gens se sentir mal parce qu’ils n’avaient pas aimé ce que la Masse glorifie… MAIS NON ! Chacun ses goûts, ses envies, ses préférences… Mais, surtout, il faut garde en tête que, en plus, certaines chroniques ne sont pas complètement honnêtes (et cela parfois en toute inconscience). Vive la pluralité des goûts, elle fait de ce monde quelque chose de beau est d’intéressant ! Affichez haut et fort vos différences, elles font ce que vous êtes et elles permettent de vrais débats et non une simple surenchère d’avis mielleux. N’ayez pas peur d’avancer à contre-courant, moi, je vous aime quand vous écrivez avec vos tripes. Et dans le même ordre d’idée : n’ayez pas honte de vos lectures ! Assumez-les jusqu’au bout, sans rougir.


La Masse n’est pas un gros mot, et en faire partie n’est pas un problème. Cette Masse est ce qui nourrit ces pratiques honteuses : on nous habitue à de la qualité bancale et on finit par ne plus savoir, à titre personnel, ce qui est bon ou mauvais pour nous, ce qu’on attend personnellement d’un livre.

J’ose vous demander, gens de la sphère des critiques amateurs du net, d’être plus honnêtes avec ceux qui vous lisent, d’assumer aimer des choses qui, franchement, ne sont pas bonnes. Je le fais personnellement. J’essaie de tempérer mes émotions quand je m’emballe pour un livre et que je sais que ce qui fonctionne sur moi ne peut pas forcément fonctionner sur les autres. Faites-en de même. Merci.

Je hiérarchise mes lectures en fonction de leur qualité mais aussi de mon ressenti. Et cette hiérarchisation m’est personnelle. Je ne demande à personne d’y adhérer, au contraire. Et, surtout, je n’autorise personne à venir taper dans mon échelle de lecture comme un gamin dans une fourmilière. Chacun est libre d’aimer ce qu’il veut, de préférer Marc Lévy à Victor Hugo, Tolkien à Bottero. Le but d’un livre est de nous transporter, de nous faire voyager et réfléchir. Qu’importe si c’est grâce à Oui-Oui fait de la peinture avec un pinceau en poils pubiens que vous atteignez la plénitude, tant que vous ne nous dites pas « Oh la la cette idée est brillante et c’est le texte le mieux écrit de tous les temps ».

PS : Résistons face à la médiocrité pour faire des sous ! Affirmons haut et fort qu’on mérite mieux ! Et assumons au passage si on ne souhaite pas mieux. Mais, surtout, lisons ce que l’on veut quand on le veut !



PPS : Si tu veux venir débattre avec d'autres passionnés, n'hésitez pas à rejoindre le sujet sur A&M.

Damnés, Tome 1 de Lauren Kate

C'est l'heure de la chronique assassine, celle qui n'avait pas pointé le bout de son nez depuis bien longtemps !



Quatrième de Couverture
Lorsque Luce rentre à Sword & Cross, un lycée d'éducation surveillée, elle est d'emblée attirée par le ténébreux Daniel.
Dans cet endroit sinistre où les portables sont interdits, où les élèves ont un passé lourd et où des caméras surveillent les moindres faits et gestes de chacun, Daniel devient une obsession.
Mais le jeune homme évite Luce, qui est aussi courtisée par Cam, un beau brun aux yeux verts. Malgré sa fascination pour Daniel, Luce n'arrive pas à résister à Cam. Ce dilemme perturbe la jeune fille, déjà déstabilisée par la présence d'ombres, qui la poursuivent et l'inquiètent depuis l'enfance. Tout est conçu pour que l'ordre règne à Sword & Cross, pourtant ce lieu deviendra le théâtre de drames troubles et mystérieux.

Mon avis
Luce est envoyée par ses parents à Swird & Cross, un lycée très surveillée dans le genre, normalement, centre de redressement soft parce que son petit copain a subi une combustion spontanée sous ses yeux dans une barque, sur un lac… Et tout le monde pense qu’elle en est responsable… Donc elle n’est pas surveillée par la police et ses parents estiment que la mettre dans un lycée bizarre est une solution. Tout va bien. Et dans ce lycée, Luce va découvrir qu’il se trame quelque chose d’étrange. Les caméras surveillent tous ses faits et gestes, elle n’a droit qu’à un appel tous les 36 du mois et les cours ne suivent pas le programme scolaire basique. Puis, dès son arrivée, des filles bizarres semblent tout connaître du lycée et avoir des passe-droits pour toutes sortes de choses, comme cette fille étrange qui sait gruger les caméras et entrer dans des zones normalement interdites aux élèves sans que personne ne s’en offusque. Pratique !
Et, évidemment, il y a deux garçons. Deux garçons sublimes, dont Daniel sous le charme duquel elle tombe au premier regard. Malgré son comportement pas très gentil envers elle : mais comment peut-il lui faire un doigt d’honneur alors qu’il ne la connait même pas ? Le goujat ! Mais, sexy, le goujat. Et dès le premier jour il hante ses pensées parce que « oh j’en ai vu des garçons trop beaux mais ça ne m’intéresse pas mais lui oh la la la ce qu’il est beau c’est fou » (je n’ai pas le livre sous la main et c’est dommage parce que c’est un passage à mourir de rire). Et il y a Cam, celui qui a tout du bad boy (il porte du cuir quoi, et il est beau mais genre trop gentil, c’est pas normal, il cache forcément quelque chose, les vrais bons garçons sont des goujats au début parce qu’ils ont toujours une bonne raison pour ça) et qui, évidemment, drague Luceà fond. Bref, un bon triangle amoureux à venir, n’est-ce pas ? Et ensuite, tout part en vrille parce qu’il se passe des choses vraiment étranges : des ombres se baladent et Luce est déstabilisée (alors qu’elle voit ces ombres depuis toujours, logique, voyez-vous), des statuts tombent sur des gens, des incendies (encore) se déclenchent tout seul ET un élève meurt. MAIS on ne mène pas d’enquête, on ne ferme pas l’établissement, non. On continue son train-train, dans un lycée hyper surveillé mais où chacun fait ce qu’il veut, où les professeurs sont bizarres, où seule la meilleure amie de Luce se dit qu’il se passe quelque chose de bizarre (elle n’a pas de nouvelles, s’inquiète, normal, mais les parents, eux, c’est pas trop leur cas).
Bref, vous aurez compris à quel point ce résumé reflète ma pensée : ce livre est une bonne blague. Une bonne grosse blague.

Comme avec la saga Hush Hush, on nous promet monts et merveilles sur le mythe des anges déchus et, comme avec la saga Hush Hush, on nous force à mériter cette histoire avec du sang et des larmes : il faut se farcir l’héroïne insipide, les personnages creux, les dialogues mauvais, les incohérences notoires, les envies de vomir, de jeter le livre contre un mur, dans les toilettes… D’accord, je parais un peu extrême. Mais, mettez-vous à ma place deux minutes : j’ai détesté Hush Hush de toute mon âme et je ne suis pas allée jusqu’au bout parce que la torture n’est pas mon met favori ; donc me retrouver une nouvelle fois dans la même situation, ça a de quoi me donner envie de tuer des gens. Encore une fois, je me fais berner : j’ai envie d’une histoire d’anges déchus et je dois souffrir pour y avoir droit. Et ce n’est pas le pire : je suis certaine que Hush Hush est mieux construit que Damnés sur l’échelle de la mort « qui est le moins pire ».
Ici, Luce est à claquer. Elle est stupide, superficielle, inintéressante… Et on essaie de nous faire croire le contraire. Mais de qui se moque-t-on ? Et ses co-stars au casting ne brillent pas non plus. Aucun personnage n’a su obtenir mon intérêt. Rien, nada. On vogue de stéréotype en stéréotype de façon insupportable : le garçon gentil au début ne peut pas être le bon et doit être le méchant, tout comme le méchant du début est forcément torturé et gentil au fond… Oui, il faut bien ça, le héros torturé qui repousse l’amour de sa vie parce qu’il ne veut pas qu’elle souffre… Alors que, bon, quand on est un ange, si notre grand amour meurt et se réincarne à chaque fois, nous évitant les passades compliquées incluant le côté moisi de Luce ressurgir, pourquoi s’en priver ? Sérieux, Daniel, profite ! Luce elle est insupportable. Et on te donne la chance de la changer à chaque fois, juste ce qu’il faut pour qu’elle oublie qu’elle est chiante ! Mais fonce !

Oui, pardon, j’ai spoilé. Mais en fait, pas tant que ça, parce que Damnésest si bien écrit que le mystère censé planer sur l’intrigue se casse la gueule dès les premiers chapitres. Donc, pour l’information de base : les trois quarts des élèves de ce lycée sont des anges, là « par hasard » et pouf, Luce, l’amour interdit de Daniel débarque, « par hasard ». Elle meurt dès qu’ils entrent en contact et se réincarne (mais avec la même figure… Ce n’est pas de la réincarnation mais passons). Et un grand chamboulement parmi les anges déchus est à venir, pour la suite de la saga…

Parlons un peu de la plume de Lauren Kate, pour la forme. Ce n’est pas brillant. Aucune harmonie, des dialogues qui tombent à plat, des essais de poésie qui s’écrasent comme les moustiques sur le pare-brise l’été… Bilan bien maigre. Mais pourquoi ? Parce qu’aujourd’hui, on n’a plus besoin de se fouler sur la qualité pour vendre en quantité et qu’importe si on prend le lecteur pour un guignol.

Fort heureusement, je n’ai pas eu à payer pour cette saga, que j’ai récupérée dans un carton de déménagement. Et je ne l’aurais pas achetée. J’aurais pris mes précautions en lisant des chroniques et en voyant les rapprochements avec Hush Hush, j’aurais très vite pris mes jambes à mon coup. J’ai commencé le second tome, parce que je suis comme ça, j’essaie de voir où sont mes limites. Elles se situent au premier quart du second tome pour le moment (parce que le second tome est encore pire, oui oui, c’est possible).

En conclusion, je ne conseille absolument pas cette chose qui se fait appeler livre, sauf si vous aimez les livres mal écrits, aux personnages stéréotypés et aux histoires d’amour niaises en premier plans (je ne juge pas, si vous aimez, foncez).

PS : Merci à tous ceux qui ont écrit des chroniques moyennement honnêtes en assumant pas aimer un livre bancal.

samedi 2 avril 2016

Les Morues de Titiou Lecoq

Mon ancienne coloc m'avait beaucoup parlé de ce livre, partout : dans ma chambre, dans la sienne, dans le salon, la cuisine, le jardin... Et sur le forum A&M aussi ! Et pour le Challenge A&M Vide ta PAL, j'ai enfin craqué !



Quatrième de Couverture
C'est l'histoire des Morues, trois filles - Ema, Gabrielle et Alice – et un garçon – Fred –, trentenaires féministes pris dans leurs turpitudes amoureuses et professionnelles. Un livre qui commence par un hommage à Kurt Cobain, continue comme un polar, vous happe comme un thriller de journalisme politique, dévoile les dessous de la privatisation des services publics et s'achève finalement sur le roman de comment on s'aime et on se désire, en France, à l'ère de l'Internet. C'est le roman d'une époque, la nôtre.

Trépidant dans son volet polar, sensible lorsqu’il raconte l’énergie dépensée par les femmes pour préserver leur indépendance, Les Morues dresse le portrait insolent d’une époque sans mode d’emploi. Un excellent premier roman. Be.
Bien écrit en un savant négligé, voilà un premier roman épatant, drôle et instructif. Le Canard enchaîné.

Mon avis
Ema est une journaliste typiquement parisienne, qui mène une vie tout sauf rangée, refusant de se laisser enfermer dans un train-train quotidien bien rodé et dicté par la société. Quand son amie d’enfance, dont la vision de la vie diffère de la sienne sur le sujet, se suicide, Ema part doucement en vrille… Et se lance dans une enquête complètement barrée parce que, franchement, non, Charlotte n’a pas pu se suicider. Et encore moins avec un flingue.

Et c’est ainsi qu’on plonge dans le quotidien d’Ema, à travers son boulot où, moyennant quelques articles « people » elle réussit à glisser quelques articles plus creusés, à travers ses amis et, surtout, le trio féministe qu’elle forme avec Gabrielle et Alice. Au fil d’anecdotes sans lien apparent entre elles, on se glisse dans la vie d’Ema, on savoure la prose de Titiou Lecoq et ses idées sur le monde actuel. Un pan de vie où, finalement, l’enquête menée sur la mort de Charlotte finit par passer au second plan pour qu’on touche le but réel du roman : faire évoluer Ema, lui permettre de comprendre qu’elle peut avoir ses convictions tout en empruntant des chemins pseudo-conventionnels.
Car c’est bien toute la question soulevée par Les Morues : les cases sont réductrices mais rien ne nous empêchent de nous y glisser pour déplacer les parois et les adapter à ce que l’on est, sans se perdre. Après tout, ces cases sont des repères sociétaux qui ne veulent rien dire si on décide d’en faire ce que l’on souhaite.

Les personnages sont intéressants, ils ont tous un petit quelque chose qui fait qu’on a envie de les suivre, de les comprendre et de les épauler dans leur épopée (parce que, oui, on peut parler d’épopée quand il s’agit d’un chemin de vie d’abord !). Une chose m’a particulièrement dérangée : le côté très parisien du livre. La provinciale que je suis ne peut s’identifier complètement à ces personnages. Il y a un réel clivage entre Paris et le reste de la France, un clivage que l’on sent bien dans ce livre. Il ne m’a pas empêchée d’apprécier pleinement ce roman mais il m’a encore rappelé à quel point les Parisiens sont différents du reste des Français. Je ne saurais même pas expliquer en quoi, c’est réellement un ressenti global. Les mentalités ne sont pas les mêmes, tout est dans le paraître, la course à la vie sociale la plus intéressante et la plus fun, le besoin de connaître les lieux branchés, de se sentir comme une personne libérée… Je me demande si c’est une question de pression, si c’est vraiment typique de Paris de devoir montrer qu’on est quelqu’un à travers tout ce que l’on fait. Oui, vous me direz, chaque être humain se définit à travers le regard de l’autre… Mais, vraiment, dans ce roman, il y a le côté « vie parisienne » très marqué pour définir une identité. Je pense qu’il faut le vivre pour le comprendre et, évidemment, de mon Sud natal, c’est compliqué. Quoi qu’il en soit, ce détail est devenu bien mineur au fil des pages.
Et d’ailleurs, on tombe parfois dans le cliché très à la mode du « celui qui travaille pour le capitalisme rate sa vie ». Les personnages qui travaillent pour les grosses boîtes à des postes importants sont mal lotis dans le roman, là où ceux qui ont un boulot différent semblent être vus comme des personnes qui s’épanouissent plus facilement. Je ne dis pas que c’est faux mais je ne pense pas que cela soit vrai : le roman est un peu trop dans le tout noir ou tout blanc sur ce point et c’est dommage.

Titiou Lecoq a une plume agréable. Ce n’est pas à travers des envolées lyriques qu’elle s’exprime mais à partir d’un phrasé très actuel et qui pourtant fait mouche. Elle réussit à mettre les mots justes sur ce qu’elle cherche à transmettre. On est loin de la plume des grands auteurs classiques mais, finalement, on est pile poil dans une écriture qui parle très bien au lecteur et, en fouillant un peu, on trouve du très beau dans quelque chose qui semble simple au premier coup d’œil.
On retrouve complètement le style de la journaliste dans ce roman : ceux qui ont déjà fait un tour sur ses articles ou sur son blog retrouveront ce qui fait le charme de son écriture.

Au-delà des préoccupations quotidiennes de nos personnages, Titiou Lecoq soulève des questions plus profondes, comme la privatisation de la culture ou le féminisme. La privatisation de la culture est un sujet intéressant mais c’est du féminisme (et non, ce n’est pas un gros mot) que je préfère parler. Les Morues, c’est le trio initial formé par Ema, Gabrielle et Alice, un trio dont le but est d’établir une charte du féminisme basé sur les expériences de chacune… Et c’est important. Aujourd’hui, trop nombreux sont les gens qui ne comprennent pas que le féminisme n’est pas une notion figée. Le féminisme, c’est ce que chacun (et oui, pas chacune parce que ce n’est pas réservé qu’aux femmes) décide d’en faire pour lui. Ema, Gabrielle et Alice adapte des idées générales à leurs envies, leurs expériences et c’est là que j’aime Titiou Lecoq : elle rappelle que le féminisme c’est avant tout vouloir mettre les femmes au même niveau que les hommes de la façon dont elles le souhaitent. Le sexe ? C’est comme tu veux : dans tous les sens avec tout le monde ou en missionnaire avec la seule personne que tu as connue dans ta vie. Le couple ? C’est comme tu veux : engagement précis ou limite floue. Ta tenue ? C’est comme tu veux : que tu portes des talons de 15cm malgré la douleur parce que tu te sens bien ou que tu te balades avec ton vieux fute qui a fait la guerre et qui a un aspect douteux. Le féminisme, c’est ça, c’est pouvoir faire, dire, penser comme tu le veux sans qu’on te dise « mais t’es une femme, tu peux pas faire ça » ou pire « tu peux faire ça mais… il y a des conséquences ». Et ça, Titiou, elle nous l’écrit noir sur blanc et ça fait du bien. Nos trois héroïnes féministes doutent parfois de leur engagement avant de se rappeler que, merde, c’est bien parce qu’elles font ce qu’elles veulent qu’elles sont féministes, et pas parce qu’elles suivent un concept. Elles écrivent leur charte mais la modifie au grès du fil de leur vie. Et ça, les enfants, c’est le point important que je veux garder de ce livre si je ne dois en retenir qu’un. Qu’on soit Parisien ou Provincial, qu’importe : faisons ce qu’on veut, quand on veut sans que notre genre ne soit une limite imposée par des personnes qui osent penser qu’un sexe implique une différence entre deux individus.

Au final, ce livre, c’est un peu comme le blog de Titiou Lecoq : une tranche de vie, à travers différentes situations mais qui permettent aux personnages de se construire, d’avancer, de vivre. Et pour tout ça, je ne peux que le recommander. Il se lit rapidement, détend mais fait aussi réfléchir. Ce n’est pas le roman du siècle, ce n’est pas ce que j’ai lu de meilleur mais j’ai passé un bon moment. J’ai apprécié chaque page malgré les petits défauts, malgré certains clichés qui m’ont fait lever les yeux au ciel, et je suis sûre que d’autres sauront aussi apprécier.