Quatrième de Couverture
Des flammes, partout des flammes... D'aussi loin qu'elle s'en souvienne, Isa est hantée par le même cauchemar. Est-ce pour cela que les villageois la considèrent comme une sorcière? Est-ce pour cela que d'étranges pouvoirs se manifestent en elle, plus violemment jour après jour? Alors, lorsque sonne l'heure de la chasse aux sorcières, Isa choisit son camp. Elle ne peut plus longtemps mettre en péril les siens. Elle part ainsi, suivant une étrange inconnue, qui mystérieusement semble tout savoir d'elle...
Mon avis
A partir de 11 ans… C’est ce qu’il y avait écrit sur la quatrième de couverture. En refermant le livre, je me suis dit que c’était tout de même dur de proposer à de jeunes lecteurs une telle histoire puis… Je me suis souvenue que, déjà, à l’époque où j’avais onze ans, j’aimais ce genre d’histoires.
Mais quel genre ?
Isa la sorcière nous parle d’une toute petite fille recueillie par Nat, veuf et déjà père de deux enfants. Une femme lui confie Isa dans la rue et il accepte la charge, ne pouvant se résigner à laisser une enfant, âgée alors de deux, dans la misère, lui qui pourtant ne roule pas sur l’or. Guérisseur et ayant le cœur sur la main, Nat élève Isa comme sa propre fille. Seulement, les temps sont à la chasse aux sorcières et si Nat n’est pas considéré comme un sorcier, Isa, elle, entend parfois les habitants du village la nommer « sorcière ». Pourquoi ? Parce qu’elle fait toujours ce rêve étrange, ce rêve fait de flammes, de douleur, de peur. C’est en se liant d’amitié avec Jennet, une pauvresse issue d’une famille de sorcière, qu’Isa va précipiter son destin et découvrir enfin qui elle est.
Melvin Burgess possède un talent indéniable. Un talent qui a su me toucher, tant par la plume que par l’univers décrit. Roman jeunesse, Isa la sorcière s’adresse sans problème aux plus grands. Les thèmes abordés sont forts, donnent à réfléchir, que l’on ait 7 ou 77 ans. Toujours fascinée par les histoires de sorcières, ce livre m’a plu, notamment par sa poésie. Les descriptions sont merveilleuses tout en restant à la portée des plus jeunes et, de plus, mon édition est agrémentée d’illustrations de Kelek, illustratrice de talent que je ne connaissais pas non plus.
J’ai suivi avec passion l’aventure de la petite Isa, ses malheurs, ses peurs, ses doutes. Tout sa période de doutes, justement, est poignante. Lorsqu’elle ne sait plus que croire, que penser, quelle voie choisir… Si nous, lecteurs, savons ce qu’il en est, nous ne pouvons que compatir avec elle. Nous voulons la prendre dans nos bras et l’aider à choisir la meilleure voie possible… Voie qu’elle finit heureusement par trouver, par des chemins détournés. Elle mérite sa fin heureuse, toute en contraste. Je regrette seulement de ne pas en avoir eu plus et d’avoir eu une conclusion un peu trop hâtive. C’est certainement le choix de l’auteur mais je suis trop avide de détails, trop immergée dans une histoire pour me contenter de quelques pages. Sur la totalité du roman, la fin est bien dosée mais voilà, je voulais plus. Comme toujours.
Les personnages secondaires ne sont pas aussi attachants qu’Isa. On les apprécie ou non, leurs apparitions/rôles sont pertinents mais, clairement, aucun n’est à la hauteur d’Isa. Sûrement l’effet de l’usage du narrateur interne. Mais pas seulement selon moi : Isa admire Iohan et, pourtant, si le personnage est fascinant de charisme et de profondeur, je n’ai pas su m’y attacher comme à Isa, cette chère petite Isa qui est vraiment le plus travaillé des personnages (et à raison).
En bref, ce livre est une vraie pépite. L’histoire n’est pas rose, au contraire, elle aborde une réflexion sur la tolérance, l’entraide et les dérives des religions mais elle s’adapte parfaitement à un public jeune. Tous les enfants ne seront pas touchés par une telle histoire mais certains y trouveront leur compte comme les plus grands peuvent y trouver le leur. Je le conseille à tous, particulièrement aux amateurs d’histoires de sorcières !
Je rajoute en prime une petite citation qui montre bien les dérives de la religion, les doutes d'Isa, le côté sombre de cette histoire :
Il saisit la bougie qui brûlait sur la table et me jeta à nouveau un regard étrange, comme égaré. Puis il prit ma main dans la sienne.
Je compris ce qui allait se passer. Son front était baigné de sueur. Malgré ma peur, ma répugnance, je le laissai faire : il oeuvrait pour mon âme et conformément à son devoir.
" Ce n'est qu'une petit main, dit-il. en enfer, ton corps entier brûlera. Il n'y en a que pour une seconde, mais en enfer, tu auras l'éternité ! "
Et, tenant fermement ma main dans les siennes, il approcha mon poignet de la flamme.
Je poussai un cri, mais il me tenait ferme. Je me débattis en hurlant, je lui griffai le visage, mais il était plus fort que moi.
" Confesse-toi ! " ordonna-t-il en ramenant mon poignet vers la flamme.
La porte s'ouvrit en coup de vent. Nat entra, soudain rajeuni, et gifla à toute volée le pasteur qui tomba de sa chaise, me libérant de son emprise. Je me réfugiai contre le mur et portai mon poignet blessé à mes lèvres.
Derrière moi, le pasteur s'essuyait la bouche. Il y avait du sang dans sa barbe.
Nat se pencha sur ma blessure.
"Faire ça à un enfant, s'exclama-t-il. Il est beau, votre Dieu ! "
J’ai lu ce livre dans le cadre du Challenge A&M Retour en enfance.