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Rambalh, c'est un pot pourri de mes lectures, un blog pour partager mes coups de coeur et de gueule. Rambalh signifie Bordel en Occitan et c'est un peu le cas de ce blog. Il est surtout né de mon besoin de garder une trace de mes lectures. Retrouvez-moi aussi sur Accros & Mordus de Lecture.

dimanche 22 mars 2020

Immortels, Tome 1 de Cate Tiernan

Comme annoncé, après avoir lu Sorcière puis Balefire, il ne me restait plus que la saga Immortels pour en finir avec les sagas traduites de Cate Tiernan. Le fiasco de Balefire a fait que j’ai lu cette saga sans attendre quoi que ce soit et heureusement : cela m’a permis d’apprécier le positif et d’éluder facilement le négatif.



Quatrième de Couverture
Nastasya est une immortelle : elle semble avoir 18 ans mais en a 459. Ces dernières décennies, sa vie consiste à noyer son ennui dans les soirées arrosées. Un soir à Londres, son meilleur ami brise le dos d’un homme qu’il trouvait gênant. Bouleversée par cette cruauté et rongée par la culpabilité de n’avoir rien fait pour s'interposer, Nasty s’enfuit aux États-Unis. Elle y rejoint River, une autre immortelle qui l’avait invitée autrefois à vivre chez elle. Nasty se retrouve alors dans un centre de réhabilitation pour les immortels qui ont perdu le goût de vivre. La rebelle jeune fille finit par se plier aux règles de la maison et se lie avec les autres habitants, dont le sombre et mystérieux Reyn. Sa nouvelle vie lui permet de renouer avec ses origines, dont elle avait enfoui le souvenir. Elle se rappelle notamment l’assassinat de sa famille auquel Reyn pourrait ne pas être totalement étranger…
« Je suis née en 1551, un joli chiffre bien symétrique. Quatre cent cinquante ans plus tard, on me demande encore ma pièce d’identité dans les bars. Avant que vous vous mettiez à crier, Waouh, génial ! Laissez-moi vous dire à quel point c’est pénible. Je suis une adulte. Depuis presque toujours. Pourtant, je ne peux sortir de cet état d’adolescence éternelle, et je ne peux pas modifier mon apparence. »


Mon avis
Nasty est une immortelle sans but dans la vie, qui vit au rythme de ses folles soirées et des ignobles gueules de bois qui en résultent. Coincée dans ce monde depuis plus de 450 ans, peut-on le lui reprocher ? À sa place, ne serions-nous pas fatigués des difficultés de la vie et ne serions-nous pas tentés d’enchainer les jours en nous laissant porter par l’oisiveté après avoir connu des premiers siècles bien trop intense ? Puis arrive l’élément déclencheur, la violence gratuite, malsaine et jubilatoire dont fait preuve son meilleur ami, en utilisant la magie, cette faculté que les Immortels ne prennent selon elle-même plus le temps d’exploiter… Prenant subitement conscience d’un malaise étouffant, Nasty prend la fuite à la recherche d’une femme lui ayant proposé son aide des décennies plus tôt.

Les Immortels est une saga à l’univers prometteur, comme tout ce que crée Cate Tiernan. Cette autrice a un don pour amener de nouvelles visions de la magie, tout comme elle a une tendance à ne pas exploiter les pépites qu’elle tient entre ses mains. Ici, il y a du mieux, quelque chose qui se rapproche de Sorcière que j’ai tant aimée.

Nasty a plus de 450 ans. Elle a vécu des drames tout au long de sa vie et a fini par mettre ses émotions sur mute pour supporter son quotidien. Ses souvenirs sont flous et cela semble cohérent : qui peut se targuer d’avoir des souvenirs exacts sur l’ensemble de son existence avec une espérance de vie de 80 ans ? Personne. Alors imaginez une existence de plusieurs siècles et pouf !

À travers un univers fantastique, Cate Tiernan aborde finalement les angoisses du quotidien, la faculté ou non à avancer à travers les épreuves, la capacité à dépasser nos traumatismes ou à les enfouir si profondément qu’on en oublie les facteurs déclencheurs. Chercher un but à sa vie, donner un sens à son existence, surmonter ses échecs, accepter les joies en sachant que les peines seront intenses elles aussi. Et surtout, se rapprocher de l’essentiel, retrouver goût aux tâches du quotidien, à la beauté de la vie malgré ses imperfections.

Immortels n’est pas un livre où l’action est intense. Le narrateur interne, Nasty, nous offre une introspection qui risque de décevoir les lecteurs cherchant à vibrer d’aventures. Cependant, j’ai apprécié ma lecture, non pas parce que c’est excellent, je ne vais pas vous mentir, mais parce qu’elle est arrivée à une période où la remise en question de notre existence, l’importance d’écouter ses émotions et de revenir aux essentiels a fait écho en moi. Ce livre est plein de défauts, les personnages y sont peu profonds, l’intrigue y est beaucoup trop peu développée à mon goût, la romance qui se dessine y est stéréotypée mais il y a quelque chose qui a su attiser mon envie d’aller au bout.

Comme toujours, je regrette que Cate Tiernan n’ait pas plus creusé la pépite qu’elle avait entre les mains avec son univers magique mais j’ai fini par m’y habituer. Si vous cherchez une aventure magique, vous risquez d’être frustrés même s’il y a tout de même un bon os à ronger. Par contre, si le thème de l’immortalité vous intéresse, notamment à travers la recherche d’un sens à la vie, vous y trouverez peut-être votre compte. Ce premier tome est une bonne introduction à tout ça (attention tout de même si vous n’aimez pas vous farcir les états d’âmes d’un personnage, ce livre se résume presque à ça).

Les avis des Accros & Mordus de Lecture

vendredi 13 mars 2020

Le Prieuré de l'Oranger de Samantha Shannon

J’ai découvert Le Prieuré de l’Oranger grâce à mes colocs de l’amour (anciennes colocs, certes, mais de l’amour pour toujours) lors de nos vacances retrouvailles. Il nous fallait un livre à lire en commun, pour poursuivre notre petite tradition LC et c’est ce titre qui est sorti du chapeau magique de Loeiza. Un pur plaisir de lire à trois et de guetter nos réactions au fur et mesure de notre avancée.



Quatrième de Couverture
Un monde divisé. Un reinaume sans héritière. Un ancien ennemi s'éveille. La maison Berethnet règne sur l'Inys depuis près de mille ans. La reine Sabran IX qui rechigne à se marier doit absolument donner naissance à une héritière pour protéger son reinaume de la destruction, mais des assassins se rapprochent d'elle... Ead Duryan est une marginale à la cour. Servante de la reine en apparence, elle appartient à une société secrète de mages.
Sa mission est de protéger Sabran à tout prix, même si l'usage d'une magie interdite s'impose pour cela. De l'autre côté de l'Abysse, Tané s'est entraînée toute sa vie pour devenir une dragonnière et chevaucher les plus impressionnantes créatures que le monde ait connues. Elle va cependant devoir faire un choix qui pourrait bouleverser son existence. Pendant que l'Est et l'Ouest continuent de se diviser un peu plus chaque jour, les sombres forces du chaos s'éveillent d'un long sommeil...
Bientôt, l'humanité devra s'unir si elle veut survivre à la plus grande des menaces.


Mon avis
Le Prieuré de l’Oranger est un roman de fantasy qui nous plonge dans une quête où le destin de trois femmes les unit dans le but de vaincre le terrible Sans-Nom, menace suprême pour l’humanité. Au cours de la lecture, nous plongeons dans les intrigues des différentes contrées menacées, dans leurs us et coutumes, leurs croyances surtout. À travers les différents points de vue, nous comprenons que l’histoire est modelée selon chacun, qu’elle peut varier d’un côté à l’autre du monde et que la part de vérité de chaque récit permet de trouver les clés ouvrant les portes de la Vérité.

Samantha Shannon a expliqué s’être inspirée de la légende de Saint Georges et le Dragon, figure du christianisme, où Saint Georges terrasse un dragon qui réclamait des sacrifices humains en sauvant la population. Il aurait par ses actes négocié la conversion au christianisme de cette population. Et, effectivement, lorsque l’on parcourt les pages de ce roman, on retrouve bien les rouages de cette histoire… Et surtout cette conversion actée par le Saint qui sauve le monde et qui impose son règne ainsi que l’idolâtrie de sa personne un millénaire durant.
La réécriture de Samantha Shannon est féministe et assumée, tout en étant fine et sans lourdeur. Les femmes y sont fortes sans avoir besoin d’écraser les hommes. Elles y règnent comme eux mais ont tout de même été gommées dans certains points clés de l’histoire… Chose que nos trois héroïnes vont rectifier en cherchant à sauver le monde.

Nous retrouvons dans cet univers les codes de la fantasy, voire de l’heroic fantasy à travers une quête complexe, des complots, de la magie, la nécessité de jongler entre les croyances de chacun, le besoin de s’unir pour vaincre.
En plus de 900 pages, les événements s’enchaînent vite tout en suivant une chronologie cohérente, s’écoulant en plusieurs longs mois, voire années. Samantha Shannon ne s’embarrasse pas d’événements inutiles, de détails superflus. Chaque chapitre amène un rouage à l’histoire et c’est en ça que son récit est très bien mené. En plus d’une écriture agréable, fluide et suffisamment appuyée par une description précise et efficace, l’autrice plante son décor au fur et à mesure de l’intrigue et ne nous perd jamais en route grâce à l’absence de longueurs de l’histoire.

Les personnages sont variés, intéressants et ouvrent des fenêtres sur un multiculturalisme très appréciable. Samantha Shannon s’inspire des cultures réelles que nous pouvons connaître pour modeler celles de sa fiction et ses descriptions nous permettent de mieux appréhender ce qu’elle avait en tête : de l’orient à l’occident, du Sud au Nord, ses choix montrent les conséquences d’un monde cloisonné lorsque la fin du monde est proche tout en accentuant l’intérêt de faire fi des différences et de les utiliser au mieux.
Si les personnages ne sont pas exploiter à leur maximum, cela n’est en rien un problème : il y a la dose suffisante même si ceux qui aiment plus de profondeur risquent d’être frustrés. Rajouter 200 pages pour approfondir aurait été prendre le risque de laisser de côté les lecteurs qui aiment aller à l’essentiel.
Les relations entre les personnages sont aussi intéressantes même si seul le lien entre Sabran et Ead est réellement exploité. C’est un choix qui ne m’a pas dérangée, qui permet de surcroît d’avoir une relation LGBTQ+ non stéréotypée, non forcée et naturelle à la lecture, et c’est un gros plus pour moi. J’aime le naturel, l’expression de la réalité de certains sentiments, désirs et les œuvres actuelles ont encore bien trop de mal à mettre en avant ces liens sans une dose de forçage insupportable. Ici, ça coule de source et ça fait du bien. On ne se dit pas « ah bon ? » ou encore « ah ouais c’est le quota minimum pour satisfaire les gens ». C’est là, c’est comme le soleil qui brille, la lune qui veille, les saisons qui défilent.

N’ayant pas lu de fantasy depuis un bail, j’ai adoré ce roman. Il réunit les bases du genre, nous tient en haleine et reste efficace. Cependant, je pense que les habitués, les grands lecteurs risquent de ne pas réellement accrocher : il n’y a rien de novateur dans ce roman et son intérêt se situe plutôt autour des liens entre les nations, les croyances et les personnages. Les lecteurs cherchant un scénario épique novateur risquent d’être déçus.

Selon moi, ce roman s’adresse surtout au grand public plutôt qu’aux habitués, ce qui n’est pas une critique mais plutôt un avertissement : Le Prieuré de l’Oranger est encensé depuis sa sortie et cette publicité peut largement induire en erreur. C’est un excellent roman pour les lecteurs éclectiques, un roman sûrement basique pour les lecteurs assidus de fantasy et d’heroic fantasy. Comme souvent, la promotion d’un livre peut être trompeuse si le public réellement visé n’est pas annoncé. Et, il faut le dire, le féminisme qui transpire dans chacune des pages de ce livre est largement mis en avant par effet de mode mais, rassurez-vous, c’est comme la relation entre Sabran et Ead : ça coule de source. Rien ne semble forcé, stéréotypé à outrance. C’est là, c’est naturel, et ça fait du bien.

Un roman que je conseille à tous ceux qui veulent lire un peu de fantasy sans avoir peur de se perdre dans une univers complexe.

« Ce qu’il y a en dessous doit être en équilibre avec ce qu’il y a au-dessus,
En ceci réside la précision de l’univers.
Le feu s’élève de la terre, la lumière descend du ciel.
Trop de l’un embrase l’autre,
En ceci réside l’extinction de l’univers.
»

Les avis des Accros & Mordus de Lecture