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Rambalh, c'est un pot pourri de mes lectures, un blog pour partager mes coups de coeur et de gueule. Rambalh signifie Bordel en Occitan et c'est un peu le cas de ce blog. Il est surtout né de mon besoin de garder une trace de mes lectures. Retrouvez-moi aussi sur Accros & Mordus de Lecture.

lundi 10 juin 2019

Mes bien chères soeurs de Chloé Delaume

Mes bien chères sœurs est un livre qui a capté mon attention lors de ma toute première visite à Fiers de Lettres, librairie indépendante de Montpellier à la sélection merveilleuse. J’ai résisté et, quelques jours après, Chloé Delaume est passée dans La Grande Librairie… Quelques jours après j’ai craqué sans l’ombre d’un remord. J’ai lu ce livre d’une traite juste avant de rencontrer l’autrice lors de la Comédie du Livre de Montpellier, une rencontre vraiment agréable, tout autant que cette lecture.



Quatrième de Couverture
« Ceci est une adresse. Aux femmes en général, autant qu'à leurs alliés. Je vous écris d'où je peux. Le privé est politique, l'intime littérature. »
En France, la quatrième vague féministe a fait son entrée : non plus des militantes, mais des femmes ordinaires. Qui remettent en cause les us et les coutumes du pays de la gaudriole, où une femme sur dix est violée au cours de sa vie, et où tous les trois jours une femme est assassinée par son conjoint.
Dans ce court texte incisif qui prône la sororité comme outil de puissance virale, Chloé Delaume aborde la question du renouvellement du féminisme, de l'extinction en cours du patriarcat, de ce qu'il se passe, et peut se passer, depuis le mouvement #metoo.

Mon avis
Mes bien chères sœurs est un essai où Chloé Delaume établit le constat d’une société française en pleine transition vis-à-vis du patriarcat et du sexisme : « Le patriarcat bande mou. Quelque chose est pourri au royaume de la flaque, les indices et symptômes croissent et se multiplient. À se regarder jouir de son impunité, le mâle alpha n’a pas vu surgir l’obsolescence de ses propres attributs et fonctions symboliques. » En ouvrant le bal avec fracas, l’autrice annonce la couleur de son écrit.

Sous un discours cynique et incisif, Chloé Delaume aborde de nombreux sujets difficiles, tous liés à la condition de la femme en France, à l’avalanche déclenchée par #metoo mais avec un regard étonnamment optimiste. J’appréhendais un peu de ne pas apprécier ce bouquin, pensant y trouver une légère touche de misandrie alors que, finalement, ce livre ne traite en rien de cela.

Chloé Delaume s’adresse aux femmes, elle nous parle, elle nous invite à la « sororité », ce mot qui se détache de la fraternité pour nous inviter à nous serrer les coudes, à œuvrer ensemble pour suivre ce mouvement de transition, d’évolution même. Rappelons d’ailleurs que cette sororité si essentielle est écrasée depuis toujours : nous, filles puis femmes, sommes élevées en rivales. Chaque autre femme est une rivale potentielle, celle qui prendra notre place, nous taclera, nous arrachera sans vergogne l’attention du mâââle que l’on convoite. Et cette rivalité créée par la société ne vaut évidemment que pour le saint graal que représente l’homme, celui qui nous offrira une vie que l’on doit mériter en étant la plus douce, la plus belle, la plus docile.

La sororité, selon Chloé Delaume, est l’arme ultime pour enfin s’affranchir du sexisme et de cette société patriarcale qui nous divisent, nous écrasent et nous forcent à reste dans de toutes petites cases où nous devons nous adapter. Elle ne nie pas le rôle que les hommes ont et auront dans la fin du sexisme, leur aide essentielle : elle s’adresse simplement à nous, ses sœurs, ses alliées naturelles et éternelles.

À travers des faits, des chiffres clés, des anecdotes pas si anecdotiques que cela, Chloé Delaume résume ce qu’elle décrit comme la quatrième vague féministe, celle du féminisme 2.0, celle du quotidien, de la femme lambda, de ce sexisme ordinaire qui me révulse, qui m’étouffe et me pousse à ouvrir grand ma bouche. Cette quatrième vague féministe, c’est nous, c’est toi, c’est moi, c’est cette sororité qui nous galvanise et nous aide à sortir des carcans ensemble, via internet, les réseaux sociaux, la remise à sa place du collègue misogyne « mais pas trop, j’aime toutes les femmes moi ».

« Apocalypse, au fait, veut dire révélation. Par les fils de la Toile partout elles se dévoilent, et dans quelques automnes leurs filles danseront sur l’eau. »

La force de Chloé Delaume, au-delà de ses convictions, tient aussi dans ses mots, ces mots succulemment acides qu’elle manie avec talent, avec une douceur percutante (j’aime mon oxymore, je l’avoue). Et ce n’est pas pour uniquement le plaisir de l’esprit que sa plume est si belle, c’est aussi pour ce qu’elle réveille, ce qu’elle faire naître chez le lecteur en toute conscience : « J’écris, ce qui signifie que pour moi chaque mot est un pouvoir. Les mots, pas les discours. S’emparer, appliquer des mots au quotidien. La sororité est le mot clé, les citoyennes s’engagent et si la loi ne peut rien, peut-être que des techniques alternatives s’imposent. »
Et si les mots sont importants, c’est aussi parce qu’en France, les femmes ont été bafouées durant des siècles jusque dans le dictionnaire de la langue française : « Liberté, Parité, Sororité, peut-être. Une République française où la langue officielle ne serait plus prisonnière d’un gang de couillidés, une société française où par les femmes, le temps d’une vague, le patriarcat serait aboli et les règles du jeu repensées. » Il s’agit évidemment de la si grande Académie Française, qui a passé des années à supprimer des mots comme « autrice » du dictionnaire pour supprimer de la langue le fait que des femmes osaient écrire des livres. Ces mots qui ont une importance capitale et qui montrent que dans notre langue, les choses déraillent : un cuisinier est un homme dont le métier est de faire la cuisine ; une cuisinière est un objet ou une femme qui fait la cuisine. De quoi pousser à la réflexion (et accessoirement à l’envie de tout casser, parfois).

Mes bien chères sœurs est un livre qui a éclairé ma route de jeune femme féministe de la quatrième vague, celle qui ne passe pas par le militantisme pur et dur mais par un éveil des consciences de son entourage. Oxymore à part entière, ce livre montre la douloureuse réalité de la condition de la femme tout en montrant l’espoir de voir un jour le bout du tunnel. Chloé Delaume est bien plus optimiste que moi sur le sujet et ça fait du bien. C’est agréable parce que ce n’est pas naïf, le mot qui convient à mon sens est « acide ». Une acidité qui pique, qui brûle parfois mais qui est agréable, qui apporte tout de même un peu de plaisir et qui annonce le futur fruit sucré que pourrait être la vie le jour d’après.

Plus les années passent et plus je me sers de mes lectures ainsi que de ce blog pour travailler mes idées, pour façonner mes opinions et pour transmettre mes découvertes sur les sujets qui me touchent. Plus le temps avance et plus mes lectures sont teintées de féminisme, de tolérance et de découverte d’ailleurs. Je ne regrette rien et je prends toujours de plus en plus de plaisir à découvrir, apprendre et partager. C’est grâce à des autrices comme Chloé Delaume que je chemine dans les méandres de ce monde et que je grandis chaque jour. D’ailleurs, depuis que j’ai instauré le tag #autrices sur mes billets, je me rends compte avec fierté que je lis bien plus d’ouvrages écrits par des femmes qu’avant et qu’ils sont désormais majoritaires sur ce blog. C’est ainsi que j’ai l’impression d’apporter ma pierre à l’édifice tout en m’enrichissant encore et encore.

Les avis des Accros & Mordus de Lecture

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