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Rambalh, c'est un pot pourri de mes lectures, un blog pour partager mes coups de coeur et de gueule. Rambalh signifie Bordel en Occitan et c'est un peu le cas de ce blog. Il est surtout né de mon besoin de garder une trace de mes lectures. Retrouvez-moi aussi sur Accros & Mordus de Lecture.

dimanche 27 août 2023

Les Jardins de Zagarand d'Éric de Kermel

Encore un livre acheté d’occasion parce que la couverture est sublime. Le marché de la seconde main donne cette possibilité d’acheter un livre sur un coup de tête, de ne pas hésiter sur le contenu des pages et de se dire « bon, si je ne l’aime pas, c’est pas grave ». Spoiler alert : heureusement que l'occasion existe !



Quatrième de Couverture
La légende dit que ceux qui vont à Zagarand n’en reviennent pas. C’est là que se rend Paul, dévasté par la perte de son fils, lorsqu’une lettre de sa sœur Mathilde l’invite à la rejoindre dans cette oasis du bout du monde. À Zagarand, la vie obéit à d’autres lois que celles qu’il connaît. À Zagarand, la nature et l’humain guident les femmes et les hommes qui ont fait le choix d’y vivre. Altérité, responsabilité et amour y sont les maîtres mots. Quelles légendes ont forgé cette utopie ? Avec Mathilde, Mayssa, Elias ou Amiane, des gestes simples, des rituels nouveaux, de puissantes émotions vont bouleverser les certitudes de Paul et lui permettre de réapprendre à vivre.

Mon avis
Paul vient de perdre son fils. Un père ne devrait pas enterrer son enfant, ce n’est pas dans l’ordre des choses. Sur l’invitation de sa sœur Mathilde, Paul va entamer un voyage pour la rejoindre à Zagarand, lieu mystérieux au milieu du désert dont il est dit qu’on ne revient jamais. Ce périple va lui permettre de vivre une aventure bien plus profonde que ce qu’il imaginait.

Les Jardins de Zagarand d’Eric de Kermel fait clairement penser à l’univers de Paulo Coelho à travers sa forme de récit initiatique avec une pointe de conte philosophique. On y retrouve l’élément déclencheur avec la perte de sens, la quête d’une lueur d’espoir, la suspension du temps avec le retour à l’essentiel, la recherche du but de l’existence… Et la comparaison s’arrête ici pour moi : si Coelho réussit à me toucher, ça n’a pas été le cas avec De Kermel.

Zagarand est une cité où chacun peut trouver sa place et son rôle en se laissant aller non pas au but choisi mais au cheminement qui y mène. C’est l’énième illustration de la maxime « Ce n’est pas la destination qui importe mais le voyage qui y mène » qui est souvent traitée dans ce genre littéraire. On y apprend l’humilité, le retour aux essentiels ainsi que la communion avec la nature. On est amené à y redécouvrir le vrai sens des relations aux autres mais aussi à soi. En somme, Zagarand est un beau village utopique qui sert de décors aux messages transmis par l’auteur.

Eric De Kermel écrit bien, ses images sont poétiques, ses messages résonnent avec les préoccupations actuelles qui nous étreignent. Seulement, ses mots ne m’ont pas touchée. Je suis passée à côté de ce livre et, en relisant les passages que j’ai soulignés, je pense que c’est parce que ses belles phrases m’ont paru mécaniques, construites pour générer des émotions et non avec émotion. Ce n’est sûrement pas le cas à l’origine mais c’est ce que j’ai ressenti.
Ce manque de réaction à la lecture est sûrement aussi dû aux personnages qui ne m’ont pas touchée du tout. Le héros ainsi que les autres personnages dont il croise la route m’ont semblé vides d’émotions. Leur flegme m’a plutôt amené à les imaginer comme englué dans une vie plate où la passion n’existe pas, jusqu’à avoir l’impression de voir évoluer des êtres lobotomisés. Zagarand est censé être un lieu où les gens vivent heureux, de manière apaisée non pas parce qu’ils n’ont plus de problèmes mais parce qu’ils ont appris à les surmonter et, pourtant, j’ai eu l’impression d’être face à un village de personnes sans âme. En fait, j’ai eu une sensation d’utopie type Le meilleur des mondes de Huxley alors que je sais que ce n’était clairement pas le but de l’ouvrage : les personnages me semblaient anesthésiés là où ils auraient dû me fasciner.

Et, finalement, intrigue comme personnages ont ce travers : l’auteur a essayé d’implanter dans ses lecteurs exactement ce qu’il voulait qu’on ressente et il n’a pas laissé la place à la pluralité du lectorat, ce qui donne cette impression d’absence d’âme.

« Lorsque nous écrivons, les vagues déposent nos émotions sur la grève tels ces minuscules coquillages qui se mélangent au sable. Auparavant, ils flottaient et roulaient dans nos esprits et voilà que leur course s’achève enfin. »

Eric de Kermel pose son image et l’explique à outrance, imposant sa vision, son but et il ne nous laisse pas de place. C’est un choix stylistique qui se vaut mais qui ne fonctionne pas sur moi. Cette lourdeur a étouffé la moindre petite émotion que j’aurais pu ressentir : si j’aime quand on me guide dans certains ouvrages, ce n’est pas le cas avec les récits initiatiques dont le but est normalement de permettre à l’individualité du lecteur de choisir ce qu’il veut en garder. Ici, tout ce qu’on m’a laissé c’est l’image de hippies défoncés qui ont le luxe de quitter leurs responsabilités même si je reste persuadée que ce n’est pas le but du roman.

Les Jardins de Zagarand est un beau livre, au cœur duquel on retrouve de douces illustrations de Valentine Plessy mais qui n’a pas su venir jusqu’à moi. Il a tout de même su atteindre d’autres lecteurs alors, si ça vous tente, allez-y.

« J’aime l’Izir qui ne fait pas comme tout le monde. J’aime l’idée d’un fleuve qui fait un court passage sur terre et se fait oublier sans lutter avec le désert où il s’unit à la terre. »

Les avis des Accros & Mordus de Lecture

dimanche 20 août 2023

Normal People de Sally Rooney

J’ai lu Normal People après avoir littéralement dévoré la série qui m’a complètement happée. Je ne suis pas particulièrement sensible au 7ème art, notamment par une réelle ignorance sur le sujet, mais tout dans la série m’a touchée : des dialogues aux silences (surtout les silences), des plans larges aux détails ainsi que les différents thèmes explorés. Et comme à chaque fois qu’un livre est à l’origine des images à l’écran, j’ai lu le livre.



Quatrième de Couverture
Connell et Marianne ont grandi dans la même ville d'Irlande. Il est le garçon en vue du lycée, elle est la solitaire un peu maladroite. Pourtant, l'étincelle se produit : le fils de la femme de ménage et l'intello hautaine connaissent ensemble leur premier amour.
Un an plus tard, alors que Marianne s'épanouit au Trinity College de Dublin, Connell s'acclimate mal à la vie universitaire.
Un jour, tout est léger, irrésistible ; le lendemain, le drame pointe et les sentiments vacillent.
Entre eux, le jeu vient tout juste de commencer.
Sally Rooney réussit le tour de force de donner une dimension unique et universelle à cette histoire. Porté par des dialogues saisissants de justesse, Normal People est un roman magistral sur la jeunesse, l'amitié, le sexe, sur les errances affectives et intellectuelles d'une génération qui n'a plus le droit de rêver, mais qui s'entête à espérer.

Mon avis
Marianne et Connell découvrent les hauts et les bas d’une première histoire d’amour à un âge où se construire est la première grande difficulté de la vie. Issus de deux mondes différents, ils se rapprochent à travers leur sensibilité et leur sentiment de ne pas entrer dans le moule que leur offre leur environnement. Au fil des années, ils vont grandir tout en s’accrochant plus que jamais l’un à l’autre à chacune de leurs retrouvailles.

La beauté de cette histoire tient dans la façon qu’a Sally Rooney de montrer la complexité du passage à l’âge adulte dans sa simplicité la plus brute. Marianne et Connell sonnent juste, ils sont à fleur de peau, en proie avec leurs émotions et leurs interrogations qui résonnent avec les lecteurs. On peut facilement s’identifier à leurs doutes, leurs souffrances, leurs épreuves.
À travers un effet miroir, ils s’ancrent l’un à l’autre, faisant pencher la balance de leur relation sans jamais réussir à maintenir l’équilibre suffisamment longtemps pour durant les premières années. Puis, petit à petit, ils réussissent à reprendre leur souffle en même temps après avoir sombré, traversant le miroir pour se tenir côte à côte et se soutenir. Marianne et Connell partagent cette sensation que seuls eux deux peuvent se comprendre dans un monde où les gens autour d’eux sont différents, simples, à la limite de la superficialité.

Et puis, une fois l’histoire terminée, on comprend que le passage à l’âge adulte est terminé, que Marianne et Connell, comme toutes les autres personnes avant eux, ont réussi l’épreuve. On réalise qu’ils n’ont rien de différents du monde qui les entoure, qu’ils ne sont que des « normal people », ce qui les rend plus réalistes encore. Ils se sont accrochés l’un à l’autre comme on le fait avec ses amis lorsqu’on est jeunes et persuadés que personne d’autre ne peut comprendre ce que l’on vit.

Je parle délibérément de « l’histoire » et non du « livre » parce que le livre m’a beaucoup moins touchée que la série. Le style de Sally Rooney est particulier, tant dans la mise en forme du texte que dans le choix des phrases. Ce n’était pas déplaisant à la lecture mais je ne suis pas certaine que j’aurais autant apprécié Normal People si je m’étais contentée du bouquin. J’ai aimé ma lecture non pas à travers la plume de l’autrice mais bien parce que je me remémorais les émotions provoquée par la série. D’ailleurs, les autres livres de Sally Rooney ne me tentent pas pour le moment. D’habitude, je suis bien plus touchée par les mots et la vivacité des émotions que provoquent chez moi les héros de papier alors, qu’ici, j’ai l’impression que la série a apporté ces réactions que le livre n’a pas fait naître chez moi. En lisant, je me projetais sans cesse vers ce que j’avais vu à l’écran. Sur papier, Marianne et Connell semblent plus plats, ils me font penser à une jeunesse désabusée et blasée, limite monotone. À l’écran, on a la sensation de personnages sur le fil, prêts à imploser à chaque seconde, ce qui est plus poignant pour moi.

Si je n’avais qu’un seul conseil à donner sur Normal People ce serait de plutôt regarder la série qui fait réellement de cette histoire quelque chose de beau et de profond.

« Il veut comprendre comment fonctionne son esprit. S’il décide de se taire pendant une conversation, Marianne lui demande : Quoi ? au bout d’une ou deux secondes. Ce “Quoi ?” lui semble contenir tant de choses : non seulement l’attention quasi scientifique à ses silences, qui lui permet de poser cette question, mais un désir de communication totale, le sentiment que tout ce qui n’est pas dit est une rupture malvenue entre eux. »

Les avis des Accros & Mordus de Lecture